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De Oban à Crinan
A partir de mercredi 20 août
C'est sous un soleil radieux que nous quittons Oban. Une jolie
brise nous fait longer la côte à toute vitesse et le paysage défile
rapidement.
Le raz témoignant des puissants courants se dirigeant vers le
golfe de Corryvreckan de sinistre réputation pour les navigateurs
est bientôt en vue. Ce raz, bien que situé à plusieurs miles du
Sound, où l'eau doit s'engouffrer avec violence, se laisse deviner
au loin par un aspect tourmenté de la mer où les tourbillons et
les déferlantes attestent de la vigueur des éléments. Nous passons à
bonne distance sans encombres dans de très bonnes conditions.
Maintenant nous longeons la magnifique côte ouest de l'ile de
Jura à quelques encablures: sauvage mais douce à la fois avec ses
belles plages de galets dont certaines sont suspendues au-dessus
de petites falaises...
Les plages suspendues de Jura
paysage vraiment étonnant. Le vent est maintenant bien fort. Les
rafales sont bien amorties par les barreurs qui jouent à bien gagner
du cap dans les surventes... Imram obéit bien; c'est un jeu dont
on ne se lasse pas...
Fraîcheur écossaise à
8nd sous le vent de Jura
L'entrée du loch Tabert est bientôt là. Ce profond loch inhabité
entouré de montagnes coupe littéralement l'île de Jura en deux.
Nous avons repéré sur la carte notre lieu de mouillage. Un fort
vent étant annoncé pour la nuit nous avons intérêt à bien choisir...
L'endroit se révèle magnifique et nous mouillons l'ancre
sur un fond semblant de bonne tenue. La soirée va se passer
à terre sur une plage de galets où nous faisons rôtir de succulentes
tranches d'agneau sur notre petit grill. Tout ceci à des relents
de vie primitive que chacun de nous apprécie en silence... la civilisation
nous semble bien loin....
Grillade sur Jura, West Loch Tarbert
Instant magique lorsque la tête d'un vieux bouc émerge juste au
dessus des nôtres, sur la petite falaise qui nous domine. Le seigneur
des lieux est simplemenet venu voir quel genre de visiteur avait
osé s'aventurer sur SA plage déserte...
Le vent est vraiment violent lorsque nous remontons à bord d'Imram.
La chaîne de l'ancre grince parfois de manière inquiétante. Il est
décidé de faire des quarts de mouillage; chacun restera éveillé
à tour de rôle et vérifiera régulièrement que les alignements des
repères à terre restent constants, preuve que l'ancre ne dérappe
pas. La nuit se passe donc à écouter les rafales et scruter l'obscurité...
rien ne bouge.
Le matin il pleut et il souffle encore fort lorsque nous appareillons
en direction de l'ile d'Islay et sa fameuse distillerie de Bunnahabhain.
No comment!
L'arrivée au ponton à bassse mer devant la distillerie est sportive
en raison du vent et du courant et nous devons nous y reprender
à plusieurs fois: cramponné à la gaffe Jean-Luc doit bientôt
la lâcher; elle pend maintenant misérablement au quai.... la tentative
suivante en s'aidant de la perche à glace encore à poste depuis
le Spitzberg en 2004 permettra de se sortir de ce mauvais pas.
Le temps d'attente de l'heure d'ouverture de la visite de la distillerie
est intelligemment mis à profit en dégustant une quantité
impressionante de mûres poussant en bord de mer. Sympathique visite,
dégustation, achat de quelques bouteilles et de confitures. Nous
sommes parés...
S'ensuit la navigation le long du Sound of Islay, étroit bras
de mer entre l'île de Jura et l'île d'Islay. Le temps est maussade,
une légère brise nous accompagne jusqu'à notre prochain mouillage,
au large de Tayinloan. Demain Rob dit nous quitter.. cela sent la
fin du voyage.. il ne reste plus que 2 jours de navigation.
Belle journée aujourd'hui: ça a commencé tôt à Tayinloan où Peter
a amené Rob à son bus. Arrivés très tôt pour prendre le premier
bus de la journée, nous passons devant un petit magasin. Nous demandons
s'il y a un endroit pour boire un café: non, tout est fermé. Mais
au bout d'un petit moment, le propriétaire revient à nous en nous
demandant comment nous aimerions notre café, blanc (avec du lait)
et bien sucré. Voilà un beau cadeau pour commencer la journée.
Je retrouve alors Imram et son équipage de plus en plus petit:
à présent nous sommes trois: Jean-Luc, Alessandro et Peter. Sans
perdre du temps nous levons l'ancre et traversons le petit détroit
qui nous sépare de l'île de Gigha, l'île de Dieu.
Cette île mérite bien son nom: elle est fertile, les plages sont
de sable blanc, l'eau turquoise et on y trouve des forêts luxuriantes
de plantes exotiques.
Flore flamboyante sur Gigha
Magique. De surcroit, le soleil est de la partie et il fait agréablement
chaud - ce qui change avec le climat des derniers jours. Qu'il
est bon de se promener en dégustant les nombreuses mûres poussant
au bord des chemins... Une petite promenade à pieds nus dans l'eau et
le sable blanc d'un véritable petit lagon achève cette jolie étape.
Le mouillage dans les eaux claires de Gigha
Nous larguerons les amarres vers midi pour retourner sur Jura,
l'île fétiche de Peter.
Les 'paps of Jura'
Il suffit de traverser Sound
of Jura, une dizaine de milles, et nous voici pour la première
fois sur la côte est de Jura. Contrairement à la côte Ouest, exposée
au vent, celle-ci est bien plus accueillante, si bien qu'on y trouve
un village, des habitations (200), un va et vient de bateaux en
tout genre et une distillerie.
Aussitôt amarrés, nous ne perdons pas une seconde pour mettre
en route l'annexe et partir à la découverte des lieux. Un détour
à la distillerie
nous fait découvrir des whiskys rares magnifiquement parfumés. Cap
ensuite sur les montagnes alentours; il y en a une qui nous sourit
et nous voilà en chemin pour le sommet.
Comme d'habitude, nous n'avons ni carte ni boussole et nous laissons
guider par notre instinct. Une ascension à travers tourbières et
pierriers nous amène au sommet. Le vent souffle fort et nous sommes
enveloppés dans un brouillard qui ne laisse qu'occasionellement
entrevoir le panorama qui est splendide. Nous longeons une crête
avant de replonger vers le niveau de la mer. En chemin, nous avons
la chance d'observer un aigle et de nombreux cerfs. On dit que l'île
est peuplée de 20000 cerfs, 2000 moutons et 200 habitants...
De retour sur Imram, Jean-Luc nous attend déjà pour le prochain
départ; ça fait 3 départs dans une journée... Et c'est parti. Le
vent s'est levé et nous voulons en profiter pour naviguer à la voile.
Mais à peine hissées les voiles, le vent laisse la place à une risée
inutilisable dans le clapot, levé par les courants de marée...
L'objectif de ce soir est d'aller mouiller tout au fond de loch
Sween. Lorsque nous nous y engageons au moteur il fait nuit
noire, il pleut, la brume est omniprésente, le radar nous aide...
pas assez puisque nous évitons in extremis un caillou par un gros
coup de marche arrière, le seul gros caillou émergeant dans ce loch...
Montée d'adrénaline.... Il était invisible au radar en raison de
la pluie. Il pleut des seaux lorsque nous mouillons enfin l'ancre.
Nous sommes trempés.
Aujourd'hui est le dernier jour de navigation vers notre but,
Crinan.
Nous avons de la visite. Un client de Peter a roulé pendant toute
la nuit pour nous rejoindre et naviguer un instant sur Imram. Les
croissants encore chauds qu'il nous apporte pour le petit déjeuner
font le bonheur de tous et sont vite avalés. C'est sous la pluie
que nous nous mettons en route. Quelques bords sont tirés en direction
du fond du loch. On se croirait dans le Jura suisse... ce pourrait
bien être le lac de Joux! Imram tire de nombreux bords de près dans
une petite brise contraire pour ressortir du loch: les manoeuvres
s'enchaînent au ras de la côte... descendre la dérive au vent...
paré à virer.... je vire... border le foc... régler le chariot de
grand voile...sortir la dérive maintenant au vent, naviguer quelques
encablures et recommencer... On avance bien jusqu'au au Sound of
Jura, puis le vent tombe.. 1 Bft...
Nous avons tout notre temps pour cette dernière petite
étape. Ainsi nous prenons notre temps et restons sous voiles pour
profiter aux mieux de cette dernière navigation. Le Sound of Jura
défile lentement au grand largue puis au vent arrière. Il y a trop
peu de vent pour faire porter le spi alors on discute, on mange,
on admire les couleurs: toutes les palettes de gris du ciel,
les teintes argentées de la mer, le vert foncé des forêts que nous
longeons.
Au loin, c'est Crinan, terminus de l'étape et du voyage 2008.
Imram va y passer l'automne et peut être l'hiver et c'est le coeur
un peu serré de terminer ce beau voyage que nous entrons dans la
petite baie où mouillent déjà de nombreux bateaux.
Le mouillage de Crinan
Peter est rassuré, son bateau y sera bien abrité pour les mois
qui viennent. Les voiles sont pliées, les nettoyages avancent vite.
Dernière soirée prévue à bord pour Jean-Luc mais avant cela
nous partons en annexe, puis à pied explorer la baie qui ne
manque pas de charme: un château, des collines verdoyantes, des
mûres, et encore des mûres le long des sentiers, et au loin des
marais où volent de nombreux oiseaux qui à leur tour prendront
leur envol pour des latitudes plus clémentes.
Encore le mouillage de Crinan
Crinan
canal
Crinan hotel
Crinan
boatyard
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Imram Voyage 2008 - Integral 12.50 - ACAPELA, 2008
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